Les conseils d'une infirmière en fertilité
Nous avons séparé les faits de la fiction sur la fertilité en répondant aux questions les plus fréquemment posées sur internet au sujet de la conception.
*Traduction : Alexandra Simon
Qu'il s'agisse de croyances populaires autour des positions sexuelles ou de vidéos TikTok sur les bienfaits de l'ananas, il est parfois difficile de séparer les faits scientifiques de certaines idées qui relèvent de la science-fiction en matière de conception. Nous avons rassemblé les questions les plus fréquemment posées par la communauté Clue et avons interrogé notre infirmière en fertilité et rédactrice scientifique de Clue, Eve Lepage, pour répondre à toutes ces questions :
Est-il vrai que la fertilité chute brutalement après 35 ans ?
Oui et non, cette chute n'est pas si brutale. Il est vrai que l'on observe un déclin lent du nombre de premières grossesses survenant à la fin de la vingtaine et jusqu'au milieu ou à la fin de la trentaine (1,2). Cependant, la croyance selon laquelle la fertilité est optimale avant 35 ans et chute drastiquement après cet âge est fausse. Il est important de savoir que les ovaires ne vieillissent pas forcément à la même vitesse que l'âge biologique. On peut rencontrer des difficultés à concevoir avant et après l'âge de 35 ans.
Les chances de grossesse dépendent de chaque personne. Il est toujours possible de concevoir à la quarantaine, mais la probabilité est plus faible (3). Les grossesses tardives comportent un risque plus élevé de complications, tant pour la personne enceinte que pour le fœtus/nouveau-né, d'où l'importance d'un suivi prénatal précoce et régulier (3). Si vous avez plus de 35 ans, il est recommandé de consulter votre médecin si vous essayez de tomber enceint·e depuis plus de six mois, ou le plus rapidement possible si vous avez plus de 40 ans (4,5). Bien entendu, l'âge n'est pas le seul facteur à prendre en compte ; vos antécédents médicaux et votre mode de vie jouent également un rôle (5).
Certaines positions sexuelles favorisent-elles la conception ?
Bien qu'il s'agisse de croyances populaires dans de nombreuses cultures, rien ne prouve qu'une position sexuelle particulière puisse favoriser la grossesse. Le sperme atteint le col de l'utérus quelques secondes après l'éjaculation, quelle que soit la position (5,6). Et dans les 2 à 10 minutes qui suivent, les spermatozoïdes se retrouvent dans les trompes de Fallope où la fécondation (rencontre entre l'ovule et un spermatozoïde) peut avoir lieu (7,8). Ce qui compte le plus, c'est de trouver une position qui soit agréable et qui vous procure du plaisir à vous et à votre partenaire. Tomber enceint·e peut prendre un certain temps, alors autant en profiter.
Surélever ses jambes et ses hanches après un rapport sexuel augmente-t-il les chances de tomber enceint·e ?
Non, la position adoptée après le sexe n'a pas non plus d'importance. Il n'existe aucune preuve scientifique selon laquelle le fait de surélever ses hanches ou de s'allonger après un rapport sexuel aide les spermatozoïdes à atteindre le col de l'utérus (5). Les spermatozoïdes nagent vers l'ovule, donc le fait de se lever ne les fait pas "tomber" (9). Une étude européenne portant sur près de 500 personnes ayant bénéficié d'une insémination intra-utérine (IIU) a révélé que celles qui étaient restées allongées pendant 15 minutes après l'intervention ne présentaient aucune différence en termes de taux de grossesse par rapport à celles qui s'étaient levées immédiatement après (10). Mais les vieilles habitudes ont la vie dure et les cliniques de fertilité ont encore tendance à demander aux patient·e·s de rester allongé·e·s pendant 10 à 15 minutes après une IIU. Donc si vous voulez faire ça aussi chez vous, allez-y.
Est-il vrai que l'on doit éviter de se masturber ou que l'on doit limiter les rapports sexuels en dehors de sa période de fécondité afin d'augmenter la concentration de sperme ?
Il existe peu de preuves indiquant que le fait de "stocker" du sperme en dehors de la période de fécondité présente un quelconque avantage ; cela pourrait même avoir un effet négatif sur la qualité du sperme si l'éjaculation remonte à plus de 5 à 7 jours. En effet, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande une période d'abstinence (pas de libération de sperme) d'un minimum de 2 jours et d'un maximum de 7 jours lors de la remise d'un échantillon de sperme dans le cadre d'un traitement de fertilité (11). Mais les recherches suggèrent qu'une abstinence plus courte peut améliorer la qualité du sperme, et la European Society of Human Reproduction and Embryology (ESHRE) ne recommande que 3 à 4 jours d'abstinence (12). En résumé : avoir des rapports sexuels ou pratiquer une insémination tous les 1 à 2 jours durant la période de fécondité peut augmenter les chances de concevoir (5).
Lorsqu'une personne transgenre/transmasculine prend de la testostérone, les chances de concevoir sont-elles totalement nulles ?
Pas forcément. L'hormonothérapie masculinisante à base de testostérone a en effet un impact négatif sur la fertilité car elle empêche généralement l'ovulation de se produire (13). Mais de nombreuses personnes ont pu tomber enceintes soit naturellement, soit par fécondation in vitro (FIV) après avoir arrêté la testostérone (14,15). Cependant, on sait peu de choses sur l'impact à long terme du traitement à base de testostérone sur la fonction ovarienne. C'est pourquoi il est souvent recommandé de congeler des ovules avant de commencer un traitement d'affirmation du genre, si vous pensez vouloir un jour des enfants biologiques (13,16,17).
La consommation de certains aliments peut-elle influencer le sexe de votre bébé ? Non. Le sexe du bébé est déterminé dès la conception ; le sperme porte le patrimoine génétique qui décide du sexe génétique, et il n'y a aucun moyen de choisir lequel des spermatozoïdes rencontrera l'ovule avec succès (9). Il n'y a donc rien que vous puissiez faire pour augmenter les chances d'avoir un garçon ou une fille. L'unique exception à cette règle concerne la FIV. Dans certains cas, la sélection du sexe d'un embryon est possible, mais le plus souvent pour des motifs médicaux uniquement (18).
L'ananas est parfois recommandé pour augmenter les chances de tomber enceint·e. Existe-t-il des données scientifiques qui le prouvent ?
Cette idée de manger de l'ananas pour augmenter ses chances de concevoir tient à un groupe d'enzymes appelé Bromélaïne que l'on trouve naturellement dans ce fruit (19). Certaines études ont montré que la bromélaïne contribuait à réduire l'inflammation - laquelle peut empêcher la grossesse (20) - mais cela n'a pas été étudié chez les humains (21). La bromélaïne aurait également des propriétés anticoagulantes - ce qui signifie qu'elle peut réduire les risques de formation de caillots sanguins et potentiellement augmenter le flux sanguin vers l'utérus - mais là encore, les recherches sont limitées et n'ont pas été étudiées chez les humains (22).
Certaines personnes affirment que ces propriétés anti-inflammatoires et anticoagulantes peuvent augmenter les chances d'implantation d'un embryon dans l'utérus, mais aucune étude ne vient étayer ces affirmations. Il est donc peu probable que la consommation d'ananas ou la prise d'un supplément de bromélaïne ait un effet sur l'implantation. Néanmoins, manger de l'ananas comporte des bienfaits : il est riche en vitamine C et en autres nutriments, donc l'ajouter à son alimentation peut être une bonne idée (23).
Si ma mère a eu des troubles de la fertilité, cela signifie-t-il que j'en aurai aussi ?
C'est possible. Certaines conditions médicales susceptibles d'affecter la fertilité, telles que le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK), l'endométriose, les fibromes et les troubles thyroïdiens, peuvent avoir une composante génétique (24-27). Cela signifie que l'affection peut être transmise de génération en génération. De même, certaines conditions génétiques comme le syndrome de Turner et le syndrome de l'X fragile peuvent augmenter le risque d'insuffisance ovarienne primaire (28). Il s'agit du terme clinique utilisé lorsque les ovaires ne produisent pas autant de follicules que la normale chez une personne de moins de 40 ans (29).
Si vous avez des antécédents familiaux avec des troubles de la fertilité ou une m énopause précoce, il est important de consulter votre médecin avant d'essayer de concevoir afin qu'il ou elle puisse effectuer des tests et discuter d'un protocole avec vous. C'est l'une des raisons pour lesquelles il est important de prévoir une visite préconceptionnelle avec un·e gynécologue ou une sage-femme avant d'essayer de tomber enceint·e (30).
Un cycle irrégulier signifie-t-il que vous avez moins de chances de concevoir ?
Oui, il est plus difficile de tomber enceint·e si vous avez des "cycles irréguliers", terme utilisé par les professionnel·le·s de santé pour décrire des cycles menstruels dont la durée varie de plus de 7 à 9 jours (31). Si vos cycles sont irréguliers, vous risquez de ne pas ovuler (libérer un ovule de l'ovaire) à un rythme régulier (31). Il est donc difficile de prévoir l'ovulation et de planifier des rapports sexuels ou une insémination durant la période de fertilité, car le moment peut varier considérablement d'un mois à l'autre (32). Les cycles irréguliers peuvent également être le signe d'un problème médical sous-jacent comme le SOPK ou un trouble de la thyroïde. Il est donc important de parler avec votre médecin des particularités de votre cycle, que vous ayez ou non l'intention de tomber enceint·e (33,34).
Avoir un orgasme (féminin) pendant les rapports sexuels augmente-t-il les chances de conception ?
Cela est peu probable. On a émis l'hypothèse que les contractions de l'utérus qui se manifestent lors de l'orgasme peuvent aider à "aspirer" le sperme qui se trouve dans le vagin au niveau du col de l'utérus. Bien qu'elle ne soit pas concluante, une étude a mesuré la quantité de "reflux" (quantité de sperme qui s'écoule du vagin après un rapport sexuel) et a constaté que la rétention de sperme était plus importante en cas d'orgasme (35). Mais il est important de préciser que rien n'a prouvé que l'orgasme augmentait les chances de grossesse. Il n'est donc pas nécessaire d'en avoir pour tomber enceint·e (36). Mais les orgasmes, c'est génial. Alors, voilà.
Les médecines alternatives comme l'acupuncture ont-elles un effet sur la fertilité et peuvent-elles favoriser la conception ?
Peut-être. Les spécialistes de la médecine intégrative (parfois appelée médecine alternative) du monde entier recommandent l'acupuncture comme traitement de différents problèmes médicaux pouvant affecter la fertilité, telles que le SOPK, les fibromes, l'endométriose, l'insuffisance ovarienne ou encore la mauvaise qualité du sperme (37). Si certaines études ont montré que l'acupuncture, associée à des traitements pour la fertilité tels que la FIV, pouvait augmenter les chances de tomber enceint·e (38,39), d'autres études ont conclu le contraire (40,41).
Si vous voulez essayer l'acupuncture, il est important que vous vous adressiez à un·e praticien·e qualifié·e. Aux États-Unis, la profession d'acupuncteur doit être enregistrée et accréditée auprès des organismes de réglementation compétents (tels que le NCCAOM ou l'ABMA) (37).
Avec Clue Plus, vous pouvez accéder au nouveau mode Clue Conception dans l'application. Clue Conception prédit les jours où vous êtes fertile, grâce à une technologie testée cliniquement. Vous pouvez donc planifier des rapports sexuels ou une insémination afin d'augmenter vos chances de tomber enceint·e.